Oxford World’s Classics

Arthur Rimbaud

Collected Poems

New translations with parallel French text by Martin Sorrell

2001

 

1869-1871

 

A la musique

 

Place de la gare, à Charlevile.

 

Sur la place taillée en mesquines pelouses,

Square où tout est correct, les arbres et les fleurs,

Tous les bourgeois poussifs qu’étranglent les chaleurs

Portent, les jeudis soirs, leurs btises jalouses.

 

—L'orchestre militaire, au milieu du jardin,

Balance ses schakos dans la Valse des fifres:

—Autour, aux premiers rangs, parade le gandin;

Le notaire pend à ses breloques à chiffres.

 

Des rentiers à lorgnons soulignent tous les couacs:

Les gros bureaux bouffis tra”nent leurs grosses dames

Auprès desquelles vont, officieux cornacs,

Celles dont les volants ont des airs de réclames;

 

Sur les bancs verts, des clubs, d’épiciers retraités

Qui tisonnent le sable avec leur canne à pomme,

Fort sérieusement discutent les traités,

Puis prisent en argent, et reprennent: ‘En somme!…’

 

Épatant sur son banc les rondeurs de ses reins,

Un bourgeois à boutons clairs, bedaine flamande,

Savoure son Onnaing d’où le tabac par brins

Déborde—vous savez, c’est de la contrebande; —

 

Le long des gazons verts ricanent les voyous;

Et, rendus amoureux par le chant des trombones,

Très naïfs, et fumant des roses, les piouipous

Caressent les bébés pour enj™ler les bonnesÉ

 

—Moi, je suis, débraillé comme un étudiant,

Sous les marronniers verts les alertes fillettes:

Elles le savent bien et tournent en riant,

Vers moi, leurs yeux tout pleins de choses indiscrètes.

 

Je ne dis pas un mot: je regarde toujours

La chair de leurs cous blancs brodés de mèches folles:

Je suis, sous le corsage et les frles atours,

Le dos divin après la courbe des épaules.

 

J'ai bient™t déniché la bottine, le basÉ

—Je reconstruis les corps, brûlé de belles fièvres.

Elles me trouvent dr™le et se parlent tout basÉ

—Et mes désirs brutaux s'accrochent à leurs lèvres.

 

1869-1871

 

To Music

 

Station Square, Charleville

 

On the square, tailored into meagre lawns,

Where all’s as it should be, flowers, trees,

Chesty bourgeois stifling in Thursday-evening

Heat, parade their small-town spite and jealousy.

 

In the gardens, as they play The Fife Waltz,

The bandsmen’s peaked caps bob up and down;

The local dandy struts around near the front;

The Notary hangs from the chain of his watch.

 

Private means in ^pince-nez underscore bum-notes;

Hefty pen-pushers drag hefty spouses along,

Accompanied—like so many elephant-minders—

By females in flounces flapping like billboards.

 

On green benches, federations of retired grocers,

Poking at the sand with pommelled walking-sticks,

Talk weightily of Treaties, then out of silver boxes

Take snuff, remarking ‘The long and short of it is…’

 

Flattening his balloon-bum on a bench,

A brightly buttoned bourgeois, Flemish gut,

Enjoys a smoke, his filthy pipe spilling

Its tobacco—smuggled in for me, you know.

 

The local lads loiter on the grass, sneering;

Trombones play, and the thoughts of boy-soldiers,

Smoking standard-issue cigarettes, turn

To love; kiss the baby, that should get the nurse…

 

—Me, I’m like a scruffy student; I find

Quick little girls under chestnut trees;

They know my game, and laugh, looking at me,

Eyes wide with indiscretion.

 

I say not a word; I go on looking

At the whiteness of their necks, the wisps, the curls;

Beneath bodices and flimsy frocks, I trace

Divine backs, starting with shoulders heading south.

 

Soon I've laid bare a shoe, a stocking…

—I reconstruct their bodies, flames of fine fever.

They find me odd, and whisper behind hands…

And my brutal desires sink hooks into their lips…