1. Regan (Re), [2001] A.N.-B. no 166



Regan (Re), [2001] A.N.-B. no 166

New Brunswick Judgments

 

 

Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick

 En matière de faillite et d'insolvabilité -

 Circonscription judiciaire de Fredericton

Le registraire Bray

Jugement: déposé le 24 avril 2001.

No du dossier: NB 8564

No de l'actif: 51086933

 

[2001] A.N.-B. no 166   |   [2001] N.B.J. No. 166   |   2001 NBQB 86   |   2001 NBBR 86   |   238 N.B.R. (2d) 44   |   105 A.C.W.S. (3d) 14

DANS L'AFFAIRE DE la faillite et l'insolvabilité de Gerald Thomas Regan


(19 paras.)


Traduction: Centre de traduction et de terminologie juridiques, Université de Moncton.

Avocats

 

 


Susan Reidpath, syndic. Frederick C. McElman, pour Gerald Thomas Regan. Bernard F. Miller, pour la Society of Lloyd's.

 



** Traduction **


LE REGISTRAIRE BRAY


INTRODUCTION


1Gerald Thomas Regan ("le failli") a déposé une requête de mise en faillite le 11 juillet 2000. Une assemblée des créanciers a eu lieu le 11 août 2000, l'Association of Canadian Names étant la seule créancière figurant sur la liste de présences. Le failli était admissible à une libération automatique le 12 avril 2001 à la condition d'avoir satisfait à toutes les obligations que lui imposait la Loi sur la faillite et l'insolvabilité (la "Loi").


2Une audience de libération devant d'abord être tenue le 8 décembre 2000 a été remise en raison de l'état de santé du failli; elle a été reportée au 16 mars 2001. Le rapport que prévoit l'article 170 et que le syndic a rédigé en date du 28 février 2001 indiquait que le failli avait satisfait à ses obligations et recommandait que sa libération fût subordonnée au paiement de la somme de 6 564 $. Le 16 février 2001, la Society of Lloyd's ("Lloyd's"), la créancière principale du failli, a signé un préavis d'opposition; elle prétendait que le failli était tenu pour responsable du fait que la valeur de ses avoirs n'était pas égale à cinquante cents le dollar et qu'il n'avait pas répondu de façon satisfaisante aux questions portant sur les opérations qu'il avait effectuées avant la faillite à l'égard de ses biens.


3Au début de l'audience du 16 mars 2001, il a été établi qu'aucune tentative n'avait été faite pour interroger le failli conformément au paragraphe 163(2) de la Loi. Toutefois, l'avocat de Lloyd's a déclaré qu'il y avait eu des difficultés à obtenir de la syndic des renseignements concernant les actions qu'avait détenues le failli dans Parrtown Place Ltd. ("Parrtown"), société dont il était également administrateur. Un ajournement de deux semaines a été accordé pour permettre qu'il y eut un complément d'échange et d'examen de documents, ce qui a été fait, et l'avocat de Lloyd's a interrogé le failli sur la foi des renseignements obtenus quand l'audience s'est poursuivie le 30 mars 2001.


La question en litige


4Le failli a-t-il dissimulé à tort des renseignements sur ses biens de telle sorte que sa libération accordée selon les modalités proposées par la syndic porterait préjudice aux droits des créanciers ?


Les faits


5Le failli a 68 ans; il était ophtalmologiste et gagnait dans ses meilleures années de 200 000 à 300 000 $ par année. Son épouse n'a pas travaillé à l'extérieur du foyer depuis 1987. Le foyer matrimonial, actuellement évalué à 367 000 $, qui antérieurement avait été propriété conjointe, a été transféré par le failli et son épouse à la propriété exclusive de l'épouse le 12 août 1992.


6Au moment de la faillite, le failli détenait des actions dans une corporation professionnelle et 150 de 600 actions privilégiées dans Parrtown. Il détient toujours ces dernières, lesquelles sont évaluées par la syndic comme ayant une valeur au pair de 1 $ chacune. Une valeur de 1 $ a été attribuée à chacune des actions détenues dans G.T. Regan Professional Corporation dans le bilan que le failli a signé le 27 juin 2000. Les intérêts dans les actions détenues dans la corporation professionnelle ont été dévolus au failli conformément à une directive donnée à la syndic lors de la première assemblée des créanciers. Aucune mention de Parrtown Place Ltd. n'a été faite dans le bilan du failli, dans laquelle le failli détenait des intérêts d'un quart. Il avait également des placements de REER que la syndic ne pouvait saisir. Le bilan attribuait une valeur estimative de 300 000 $ aux REER. L'avocat de Lloyd's met en doute l'exactitude de cette estimation et prétend, en outre, que la dissimulation de renseignements au sujet de Parrtown était illégale. Bien qu'on eût prétendu pour le compte du failli qu'il avait omis d'inclure les actions parce qu'il les croyait sans valeur en raison de la dette à long terme de la compagnie, laquelle dette était supérieure à ses avoirs, Lloyd's soutient que si l'avoir principal avait été vendu au prix demandé de 885 000 $ dans une récente inscription de vente, une valeur nette aurait pu en résulter puisque la dette hypothécaire en souffrance était d'environ 450 000 $. Toutefois, aucune offre n'a été reçue et le bâtiment n'a pas été vendu.


7En 1993, le failli a transféré à son épouse des actions qu'il détenait dans une compagnie dénommée Sheradave Ltd. L'avocat de Lloyd's prétend que c'est là un avoir considérable qui a été mis à l'abri des créanciers et qui fonctionne à la manière d'un "compte en fiducie familiale".


8Les trois principales questions en litige soulevées sont décrites par Lloyd's comme indiquant un manque de franchise de la part du failli qui, prétend-on, porterait atteinte à l'intégrité de la procédure si le failli devait être libéré conformément à la condition recommandée par la syndic.


Décision


9Il est acquis que la valeur des avoirs du failli n'est pas égale à cinquante cents par dollar de ses obligations non garanties. Selon Lloyd's, le transfert des actions détenues dans Sheradave constitue une preuve suffisante qui permet de conclure que ce fait s'expliquait par des circonstances dont le failli devrait être tenu pour responsable. Interrogé au sujet de la propriété bénéficiaire de ce placement, le failli a déclaré que celui-ci appartenait à son épouse, qui l'utiliserait à sa retraite.


10Le failli a aussi été interrogé au sujet du transfert à son épouse du foyer matrimonial. Ce transfert s'est produit plus de cinq ans avant la faillite et, bien que l'avocat de Lloyd's affirme que Names savait au début des années 1990 que des obligations étaient possibles, aucune preuve n'a été présentée qui indiquerait que le failli ne prévoyait aucunement une insolvabilité personnelle à l'époque. Il se peut que ce fût là une mesure prudente prise en prévision d'éventualités futures, mais rien ne prouve que l'intention était de frustrer des créanciers existants au moment du transfert ou prévisibles dans l'avenir. L'opération touchant le bien matrimonial n'est pas déterminante au regard des questions en litige qu'il s'agit de trancher au cours de l'audience.


11Peut-on dire la même chose à propos du transfert des actions détenues dans Sheradave Ltd ? Pour l'avocat de Lloyd's, ce transfert devrait être considéré à la lumière de l'alinéa 173(1)d) de la Loi comme constituant une perte d'avoirs qui autrement auraient pu servir à acquitter des obligations ultérieures. La créancière adverse considère la valeur des avoirs ainsi transférés comme une somme placée en fiducie pour le failli, dont des portions devraient servir à satisfaire les créanciers. On ajoute que c'est là un motif pour lequel le failli pourrait être tenu pour responsable en raison du fait que la valeur de ses avoirs n'est pas égale à cinquante cents par dollar de ses obligations non garanties.


12La syndic est consciente de la valeur du compte Sheradave. La preuve présentée à l'audience n'a pas établi de façon concluante que Sheradave est un compte en fiducie au profit personnel du failli, même s'il a semblé qu'il pouvait tirer profit de l'usage qu'en ferait son épouse. Au demeurant, l'audience de libération ne constitue pas un lieu propice pour mener l'examen détaillé que nécessite pareille détermination. Si la syndic décide que les fonds ne sont pas détenus en fiducie pour le failli et ne devraient pas servir à satisfaire les créanciers, ces derniers jouissent du recours que prévoit l'article 38 de la Loi.


13Les actions détenues dans Parrtown auraient dû figurer au bilan dressé par le failli. Il importe peu que le failli estime qu'un avoir a peu de valeur ou qu'il n'en a aucune. Tous les avoirs doivent être déclarés au syndic, qui est habilité à effectuer une évaluation. Si s'avère possible une vente qui permettra la réalisation du prêt de l'actionnaire, celle-ci pourra être réclamée par la succession au profit des créanciers. Ce principe s'applique également à la divulgation de la valeur des REER. Bien que ces fonds soient insaisissables, ils n'en sont pas moins des avoirs, et tous les détails devraient être communiqués à la syndic; celle-ci pourra effectuer une actualisation de façon à indiquer la valeur après impôt, s'il y a lieu de le faire. Dans le cas qui nous occupe, la syndic connaît maintenant ces affaires, et l'intérêt que détient le failli dans les biens de Parrtown, peu importe leur valeur, lui est dévolu pour que distribution soit faite aux créanciers.


14La preuve portant sur les omissions du failli d'effectuer une divulgation complète pèche par défaut par rapport à celle qui doit établir l'existence d'une intention frauduleuse, aussi n'y aura-t-il pas lieu de présumer qu'il y a eu mauvaise conduite.


Conclusion


15Le transfert du foyer matrimonial est étranger à la libération du failli. La syndic connaît la valeur des avoirs dans les REER, lesquels sont des avoirs exemptés que ne peuvent obtenir les créanciers, et elle possède le pouvoir d'utiliser au profit des créanciers quelque valeur que ce soit dans les avoirs possédés dans Parrtown.


16La seule question qui reste quelque peu imprécise est celle-ci : Quel est l'état des placements faits dans Sheradave et le failli a-t-il dans ceux-ci quelque intérêt bénéficiaire auquel les créanciers pourraient avoir droit ? L'avocat de Lloyd's le qualifie de "compte de placement familial". Si une preuve suffisante devait être présentée pour établir que c'est là une qualification exacte, il serait nécessaire de déterminer quel intérêt le failli détient dans celui-ci et si une partie de quelque revenu que ce soit pouvant en être tiré devrait être mise à la disposition des créanciers.


17La syndic a décidé que le transfert des biens dans Sheradave qui s'est produit plus de cinq ans avant la faillite outrepasse sa compétence. Une suspension de l'audience de libération pour permettre qu'une évaluation soit effectuée dans les circonstances serait dénuée d'utilité.


18Il convient de le répéter, un créancier jouit d'un recours en vertu de l'article 38 de la Loi, s'il a demandé que la syndic agisse d'une manière qui, de l'avis de son représentant, serait profitable aux créanciers, et la syndic a refusé. Une requête présentée en conformité avec l'article 38 serait la façon indiquée de procéder pour Lloyd's si elle est mécontente de la façon dont la syndic a agi à propos de Sheradave.


19Comme condition de libération, la somme de 6 564 $, payable par le failli en versements mensuels minimaux de 547 $, sera dévolue à la syndic. Le failli sera libéré quand cette somme de 6 564 $ aura été intégralement payée.


LE REGISTRAIRE BRAY

 


End of Document